tournai, dernier jour en caserne pour Philippe Ménart 31-05-11

Nord Eclair a écrit:Les huit souvenirs du colonel Ménart

De l’incendie d’Unisac à l’enlèvement de Sabine, le colonel évoque 36 ans de carrière

Philippe Ménart, sapeur-pompier de Tournai, a pris sa retraite anticipée à 56 ans. Il a fêté son départ mardi à la caserne. Après 36 ans passés principalement au service intervention, il revient sur les souvenirs qu’ils l’ont le plus marqué. Accident, incendie ou Sainte-Barbe, positif ou négatif... le plus âgé des pompiers de Tournai nous raconte tout.

Ce mardi était le dernier jour où Philippe Ménart, 56 ans, devait porter son uniforme. Le cœur gros, il a dû dire au revoir à la grande famille des pompiers de Tournai. Et d’ailleurs, pour lui prouver leur amitié, ses collègues, les pompiers de l’équipe B, sont allés le chercher chez lui à Kain à 6h30 afin de l’emmener à la caserne une dernière fois. Sirènes et gyrophares pour rameuter les voisins.

Philippe Ménart, dit le colonel, revient avec nous sur sa carrière longue de 36 ans chez les pompiers. Il nous raconte les souvenirs qui l’ont le plus marqué depuis son arrivée le 11 octobre 1975 en tant que volontaire.

1 Réaliser son rêve: devenir pompier

Quand il était plus jeune, Philippe Ménart était bénévole à la Croix Rouge de Tournai. “ Un jour il y a eu un feu toxique sur le Site Saint-Druon à Antoing. Il n’y avait pas assez d’effectifs donc avec la Croix Rouge nous sommes allés prêter main-forte. C’est là que m’est venue l’envie de devenir pompier. Et dès que j’ai pu j’ai réalisé mon rêve. Je suis entré comme pompier volontaire en octobre 1975. ”

Philippe Ménart a été un temps troisième téléphoniste quand le service 100 se trouvait encore à Tournai. “ J’étais centraliste et dans le service intervention quand il manquait d’hommes. Lors du déménagement sur l’avenue de Maire, j’ai demandé à n’être affecté que dans les garages au service intervention. Je ne voulais faire plus que ça jusqu’à la fin de ma carrière. ”

2 Les débuts du SMUR:une famille tuée

“ Je ne sais plus en quelle année c’était. Je me souviens juste que c’étaient les débuts du SMUR. Nous avions dû nous rendre sur l’autoroute pour un accident. Une voiture avait été percutée par un camion. Bilan très lourd: une famille tuée, les deux parents et les cinq enfants. L’autoroute avait été bloquée le temps de dégager la route. De plus, le soir, c’était le banquet de l’équipe. Il s’est déroulé mais tristement. ”

3 Le quartier du Viaduc en feu: plusieurs brûlés

Du début de sa carrière, Philippe Ménart garde le souvenir de l’incendie qui avait ravagé le quartier du Viaduc à Tournai. “ Il était 19h, on venait de prendre notre poste. Sur place, il y avait des brûlés graves et des morts. Sur le coup on est dans l’action, mais une fois rentré on a le contrecoup. À ce moment-là, nous n’avions aucun soutien psychologique. On en discutait entre nous. On est humain mais on ne doit pas prendre les choses à cœur sinon on ne peut pas tenir. ”

4 la galerie “ Le Shopping ”: un incendie d’une semaine

La galerie commerciale, Le Shopping, qui se trouve à côté du Colruyt sur les quais avait été la proie d’un gigantesque incendie.

“ Toute la galerie avait brûlé. L’incendie a duré une semaine. Heureusement, il n’y a pas eu de victime cette fois. ”

5 Il faisait si froid que l’eau des tuyaux gelait

Philippe Ménart se rappelle très bien de l’incendie du Prieuré à Blandain, il y a de ça 20 ans.

“ C’était en plein hiver. Il gelait vraiment fort. À tel point que l’on arrosait le Prieuré mais aussitôt l’eau gelait. C’était beau mais pas pratique... Durant l’incendie, un officier avait été gravement brûlé. ” Et dans les incendies impressionnants, le colonel Ménart se souvient de celui de la Lactilite à Kain et de l’usine Unisac, avenue de Maire à Tournai. Il garde également un fort souvenir du fameux incendie de la tannerie Poulet à Estaimbourg.

6 L’enlèvement de Sabine Dardenne: sa voisine

Philippe Ménart avait géré les battues pour tenter de retrouver Sabine Dardenne, enlevée par Dutroux, en collaboration avec la police et l’armée. “ Nous étions tous bénévoles. On faisait les recherches en dehors de nos heures de travail. Au début, les battues étaient intensives. Puis au fil du temps, c’était en fonction des indices. L’Escaut a aussi été sondé. Nous avions toujours l’espoir de la retrouver vivante. Quand on l’a retrouvée, nous avons été prévenus de son retour. Tout le quartier du Renard à Kain l’attendait. C’était une grande fête.”

7 Son premier réveillon à la caserne, c’était en 2010

Le pompier est très famille. Il n’a jamais voulu mettre son épouse, Marie-Chantal, et ses deux filles, Aurélie et Aude, de côté pour les fêtes de fin d’années. “ La première fois que j’ai passé le nouvel an à la caserne c’était en 2010. Je savais que c’était la dernière fois que j’en avais l’opportunité. La soirée a été relativement calme donc nous avons pu profiter du repas. ”

8 Mais pourquoi on l’appelle colonel ce sapeur-pompier

L’anecdote se passe du temps où Raoul Van Spitael était bourgmestre de Tournai. “ Lors de la Sainte-barbe, nous invitons toujours des échevins et des gradés de la police et de l’armée. Ces derniers partent ensuite chez le commandant pour boire un verre de l’amitié. Pour rigoler, j’avais enfilé le costume du colonel de l’armée qui était présent. Je faisais le pitre dans le couloir. Mon commandant m’a vu et est venu m’attraper par la peau du dos. Il m’a amené au milieu de tous les officiers et m’a présenté comme nouveau colonel. Tout le monde a rigolé et finalement je suis resté avec eux. Depuis ce jour, on m’appelle colonel, que ce soit à la Ville ou par radios. Alors que je suis simplement sapeur-pompier, et que chez les pompiers le grade de colonel n’existe pas. ”

Philippe Ménart prend sa retraite des pompiers le cœur gros, après une carrière bien remplie. B.L